La loi Pécresse ne passera pas !
31/10/2007 |
Comme vous le savez sans doute déjà chers lecteurs, au mois d'août dernier était votée la loi dite « libertés et responsabilité des universités » également appelée « loi d'autonomie des universités ». Le premier ministre François Fillon s'était déjà obligeamment chargé de nous avertir que cette réforme serait sans doute « la plus importante » de son mandat. Quels sont alors les changements apportés par cette loi au modèle universitaire actuel ? Deux axes principaux se dégagent le financement des universités et leur « gouvernance ».
Pour le financement, il ne se fera plus de manière planifiée et récurrente par rapport aux besoins exprimés par les universités et les populations mais suivant une logique de contrat entre l'université et l'État visant à valoriser une recherche plus compétitive. Cette logique contractuelle est déjà en soi une remise en cause des missions du service public d'enseignement supérieur : assurer à chaque citoyen le développement d'un esprit critique et l'acquisition de qualifications reconnues lui permettant de faire valoir ses droits face au patronat. Le gouvernement va cependant plus loin dans l'abandon du service public puisqu'il confie aux universités de nouvelles compétences, notamment la gestion de leur patrimoine mobilier et immobilier, le tout sans donner de moyens supplémentaires. Comment les universités vont elles pouvoir financer leur activité avec ces dépenses supplémentaires ? Le gouvernement Fillon a la solution les partenariats privés. Les universités pourront donc se financer directement par le biais des entreprises sans réel contrôle. Quant à la « gouvernance », les universités seront désormais dirigées par un nombre restreint de personnes regroupées au sein d'un Conseil d'Administration comprenant une grande proportion (jusqu'à 40%) de « personnalités extérieures », représentantes du « monde économique ». De plus, cette loi instaure une grande concentration de pouvoirs entre les seules mains du président véritable P-DG tout puissant. Cerise sur le gâteau, ce président omnipotent n'est plus obligé d'être enseignant/chercheur et peu donc tout a fait être l'un des chefs d'entreprise partenaire de l'université. Pour parachever le tout, le gouvernement met également en place une barrière sélective à l'entrée de l'université par le biais de « l'orientation active », dispositif visant à décourager certains bacheliers de s'inscrire à l'université. La boucle de la liquidation du service public est ainsi bouclée : par le biais des financements les entreprises contraignent les universités à orienter leur recherche et leurs enseignements dans un sens qui leur profite, par le biais du CA où elles ont la main haute elles font acter leur volonté par la direction politique de ces mêmes universités. Ce système aboutit donc à l'émergence d'une université à deux vitesses avec, d'un côté des universités surfinancées offrant des formations de qualité aux étudiants qui auront pu passer la barrière de « l'orientation active », de l'autre des universités sous-dotées, offrant des formations courtes, non reconnues sur le marché du travail pour les étudiants défavorisés. La bourgeoisie caricaturale au pouvoir met donc tout en place pour réserver à sa progéniture l'accès aux études supérieures, cherchant à empêcher toute ascension sociale afin de conserver le pouvoir économique entre ses seules mains. Parce que chacun de ses articles est en opposition frontale avec l'intérêt des jeunes et des travailleurs et avec le projet d'une société socialiste où la collectivité donne à chacun les moyens de vivre et de s'émanciper de toute tutelle familiale, religieuse ou économique nous ne pouvons que nous prononcer pour l'abrogation de la loi « relative aux libertés et responsabilités des universités ». ∎Nous avons pris la décision de publier ci-contre cet appel unitaire contre la loi Pécresse, à l'initiative de syndicalistes étudiants et de militants d'organisations politiques de jeunesse de gauche. Cet appel participe de la construction de l'Unité face aux attaques du gouvernement.
Appel à l'Abrogation de la loi Pécresse
Nous, signataires du présent appel, organisations politiques, syndicales, associatives et collectifs, exigeons l'abrogation de la loi Pécresse, « relative aux libertés et aux responsabilités des universités ». Nous rejetons le principe même de cette loi et nous refusons d'accorder de la légitimité au processus de pseudo concertations mené par le gouvernement au mois de juillet. Nous n'acceptons notamment pas : l'autonomie de gestion budgétaire et la recherche de ressources propres. En organisant la pénurie budgétaire, l'Eta/ contraint les universités à recourir pour son financement aux Jôndations et au mécénat, c'est-à-dire aux intérêts privés : cela permet une véritable privatisation. De plus, autonomie finaneière et pénurie budgétaire donneront prétextes et moyens à l'augmentation des frais d'inscription, facteur de la sélection sociale ; la systématisation des dispositif's de pré inscription et d'orientation active qui introduisent une forme de sélection à l'entrée de l'université ; la révision de la composition des conseils d'administration et le renforcement du pouvoir des présidents, qui ont pour f'onction de faciliter une gestion entrepreneuriale. La proportion de personnalités extérieures issues du patronat, non élues, augmente au détriment des élus des personnels et des étudiants. Les universités sont destinées à être transformées en centres de formation et de recrutement adaptés aux besoins immédiats du patronat; le recrutement de contractuels précaires (déjà nombreux aujourd'hui) pour le personnel enseignant et non enseignant à la place de fonctionnaires cassera les statuts de la fonction publique, et encouragera également la séparation entre enseignement et recherche. Cette loi est un élément clé dans la mise en ceuvre du projet de privatisation et de professionnalisation de l'enseignement supérieur et de la recherche. Elle accentue l'individualisation des diplômes qui ne correspondront plus à des qualifications reconnues dans le monde du travail. Pire encore, elle fait de l'université une véritable entreprise en l'autorisant à exercer des activités commerciales confondues avec ses activités de service public. C'est donc une attaque contre les droits de l'ensemble des travailleurs. Parce que cette loi va aggraver et non résoudre les problèmes de l'université, nous devons nous battre également :pour de véritables diplômes nationaux reconnus dans les conventions collectives, pour un financement public de l'enseignement supérieur à la hauteur des besoins, pour le maintien du statut des personnels et la titularisation de tous les personnels précaires. Par ailleurs, le gouvernement multiplie les offensives : service minimum, chasse aux immigrés, franchises médicales ; et en prépare d'autres : régimes spéciaux de retraites, contrat de travail unique. Il cherche à s'attaquer en priorité aux secteurs les plus mobilisés ces dernières années, parmi lesquels les jeunes et les salariés du public, et à saper leur capacité de mobilisation. L'université est donc une cible de choix. C'est pourquoi nous appelons les étudiants et les personnels, enseignants et BIATOS, à la mobilisation pour obtenir l'abrogation de la loi Pécresse, conformément aux appels locaux de nombreuses universités (Toulouse Mirail, Rennes I, Bordeaux I, etc). Nous proposons aux organisations qui se sont prononcées pour l'abrogation de la loi de construire ensemble la lutte et nous appelons celles qui ne l'ont pas encore .fait à nous rejoindre. Pour notre part, nous préparons la construction démocratique de la lutte et nous ne nous interdirons aucun moyen d'action, notamment la grève. Nous apportons notre soutien à toutes les initiatives locales allant dans le sens de la mobilisation.
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